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19 janvier : contre la réforme des retraites, les ouvriers de l’automobile montent dans les tours

Le jeudi 19 dernier, journée nationale contre la réforme des retraites, a été exceptionnel dans le secteur automobile, à PSA, Renault ou Toyota. On n’avait pas vu ça depuis des années et des années ! Environ 500 salariés mobilisés à PSA Mulhouse, près de 500 à PSA Vesoul, 250 à PSA Poissy, 200 à PSA Rennes, 200 à PSA Douvrin, près de 200 à PSA Trémery, plusieurs centaines à Renault Cléon et Renault Flins, 350 à Renault Douai, des dizaines à Renault Lardy, 300 à Toyota Onnaing, 75 % de grévistes à la Fonderie de Bretagne…

Pour beaucoup, c’était leur première grève et première manifestation. On comptait des centaines d’ouvriers de l’automobile dans les différents cortèges aussi bien à Paris qu’en régions. Certains sont restés chez eux pour garder les enfants, les professeurs des écoles faisant grève aussi. À Renault Lardy, les liens avec d’autres entreprises du secteur ont été réactivés pour prendre les cars ensemble et rejoindre la manifestation.

Quelques jours avant la grève du 19 janvier

On pouvait sentir l’ambiance changer dans bien des usines avant la journée du 19. Des militants l’ont vu venir : énormément d’ouvriers voulaient aller à la manif. À PSA Poissy, dans certains secteurs par exemple, on cherchait même qui ne voulait pas y aller. Dans bien des coins c’étaient les ouvriers qui allaient chercher les militants syndicaux pour savoir où prendre les cars. En premier lieu les ouvriers âgés, ceux qui ont commencé à travailler à 16 ans ou 19 ans et à qui on dit aujourd’hui qu’ils ne pourront pas partir en retraite, ou alors qu’ils devront subir les décotes.

Macron veut baisser le montant des retraites en contraignant à partir à 64 ans, alors que tout le monde sait qu’en usine peu d’ouvriers réussiront à atteindre cet âge au travail : beaucoup risquent d’être licenciés pour inaptitude ou de démissionner avant, pour cause de conditions de travail dégradées, avec des retraites réduites à peau de chagrin.

Alors à PSA Poissy encore, pendant les quelques jours qui ont précédé la grève, on a pu voir bien des frontières abolies entre ouvriers, ex-Gilets jaunes ou syndicalistes, quels que soient les bulletins de vote, cultures ou religions, tous étaient bien décidés à faire payer à Emmanuel Macron sa réforme anti-ouvrière.

Le patronat de l’automobile en soutien à la réforme et contre la grève

Une réforme que le patronat de l’automobile est bien décidé à soutenir, de Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, à Carlos Tavares et Luca De Meo, PDG de PSA-Stellantis et Renault. Partout, face à l’ampleur de la mobilisation, les directions des usines ont tout fait pour que les ouvriers ne se mettent pas en grève et surtout n’aillent pas manifester.

À PSA Sochaux, la maîtrise a demandé préventivement aux ouvriers qui allait faire grève jeudi 19. La direction a senti qu’elle ne pourrait pas faire tourner les chaînes, elle a donc mis l’usine, les jeudi et vendredi derniers, en chômage partiel. La direction de Sochaux a alors voulu affréter un bus pour remplacer les grévistes à PSA Mulhouse : aucun volontaire. Le directeur du montage, fou de rage, a interpellé ses équipes : « Il faut motiver vos troupes ! » Sans grand succès.

À PSA Poissy, alors que l’usine manque de pièces et que la direction utilise souvent le numéro vert pour dire aux ouvriers de venir ou de rentrer chez eux, elle a absolument voulu faire tourner l’usine le jour de la manifestation. Des salariés ont été changés de secteur, du personnel de nuit basculé en journée, des intérimaires en formation directement mis sur chaîne, des hiérarchiques mis sur les lignes, jusqu’aux salariés des bureaux… la production a quand même dû s’arrêter pour tous avant 19 heures 30.

Cortège Peugeot Mulhouse le 19 janvier
Photo de Martin Wilhelm

Pour les retraites, les salaires et contre le chômage !

Les ouvriers mobilisés sont fiers de la gifle infligée au gouvernement jeudi dernier. Presque tous disent qu’ils remettront le couvert mardi 31 janvier, prochaine date de mobilisation nationale interprofessionnelle. Se sentant attaqués personnellement, les ouvriers sont revenus de la manifestation du 19 en partageant leur enthousiasme avec les autres. Certains commencent à découvrir la force qu’ils constituent en luttant ensemble.

Car derrière l’attaque sur les retraites, c’est l’inflation et les salaires qui ont fait discuter ces derniers mois. Des ouvriers le disent : partir à 60 ans diminuerait le chômage en laissant la place aux jeunes. Et puisque les cotisations retraites sont proportionnelles au salaire, il faudrait aussi imposer l’augmentation des salaires – 400 euros de plus pour tous, pas moins ! – pour ne pas finir avec des retraites de misère comme c’est déjà bien souvent le cas aujourd’hui.

Pour la grève du 31 janvier, beaucoup d’ouvriers restent encore à convaincre. Mais beaucoup de ceux qui ne se sont pas mobilisés ont regardé la grève avec sympathie, certains n’ont pas hésité à faire la grève du zèle sur les chaînes. Alors il faudra encore se réunir et discuter pour entraîner les hésitants, afin que tous les ouvriers mobilisés le 19 deviennent des militants de l’extension de la grève, pour gagner face à Macron !

Le 24 janvier 2023, Correspondants