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La Poste : la grande réorganisation a commencé

La Poste l’avait dit depuis des années, et cette fois-ci il semble qu’elle n’a pas menti : la grande restructuration aura lieu en 2023. Beaucoup de médias en parlent, souvent en prenant pour argent comptant la soupe de « justifications » servie par la direction.

Commençons par rétablir quelques vérités…

Oui, ce n’est un secret pour personne, le volume du courrier envoyé et distribué est en nette baisse. Entre 2013 et 2021 il a été quasiment divisé par deux, passant de 13,7 milliards de plis à 7,5 milliards, conséquence de l’évolution technologique et sociétale.

Mais ce que La Poste oublie souvent de dire, c’est que dans cette même période de temps le colis a vu une augmentation de près de 250 % passant d’1 milliard de colis distribués à plus de 2,3 milliards. Et inutile de préciser qu’un colis coûte au moins sept fois plus cher à envoyer qu’une lettre. Cela alors que dans cette même période, 20 000 postes ont été supprimés, très majoritairement dans la branche courrier-colis.

Alors, pauvre La Poste ?

L’activité classique de La Poste, la distribution de lettres et de colis, a pour la première fois de son histoire en 2022 été en déficit. La Poste a toujours rapporté de l’argent à l’État lorsqu’elle était PTT, et depuis le passage en Société anonyme (SA) en 2010 la branche courrier-colis a toujours été bénéficiaire.

Ce déficit sur l’activité historique pourrait largement être compensé par l’activité financière florissante, portant le résultat du groupe à 2,1 milliards de bénéfices. Mais hors de question de prendre sur les bénéfices des autres branches pour financer le courrier. La Poste sait jouer sa carte d’entreprise ayant « mission de service public » et a demandé à l’État de mettre la main à la poche. L’État volera ainsi au secours à hauteur de 500 millions d’euros.

Avec un argument massue du patron Wahl : « le service universel postal (les prestations de base, dont la levée et la distribution six jours sur sept) est déficitaire d’environ 1,5 milliard ». Ça fait peur, mais ça ne veut rien dire. Car cela fait bien longtemps que facteurs et agents de tri font autre chose qu’uniquement « les prestations de base », en particulier le tri et la distribution des paquets ou de la pub non adressées, totalement intégrés aux tournées. Ce transfert de 500 millions est ridicule puisque l’unique actionnaire de la SA la Poste n’est autre que l’État (par le biais de la Caisse des dépôts et directement).

La Poste a séparé en deux le traitement du courrier et du colis. L’activité en croissance, le colis, est largement ouverte à la sous-traitance et à l’intérim. Son objectif est d’extorquer malgré tout de la plus-value dans une activité en décroissance, le courrier. Pour cela il faut taper très fort sur les salariés.

Une attaque sur trois fronts contre les postiers et les usagers

1- D’abord sur les salaires. Avec seulement 4,5 % d’augmentations sur 3 ans entre 2019 et 2022, les postiers ont perdu près de 15 % de pouvoir d’achat.

2- L’arrêt du « timbre rouge » qui permettait d’espérer une distribution le lendemain. Elle supprime en même temps la lettre éco à 1,14 €, pour une entrée de gamme maintenant à 1,64€ ! Avec à la clé une restructuration importante dans les centres de tri et une diminution des liaisons routières. Des économies immédiates, et une usine à gaz pour les usagers. Pour donner le change, La Poste propose d’envoyer un mail qu’elle se charge d’imprimer et distribuer: la « e-lettre rouge ». Coût du fax: 1,49 €…

3 – Enfin et peut-être surtout, La Poste vient d’annoncer une grande expérimentation sur 68 sites en supprimant une tournée sur deux. Le facteur ferait une tournée A le lundi, mercredi et vendredi et une tournée B le mardi, jeudi et samedi. Résultat concret : chaque usager ne verra le facteur qu’un jour sur deux. La Poste se défend en disant que pour les objets prioritaires comme la e-lettre rouge, ou la presse quotidienne le facteur passera quand même tous les jours… s’il y en a. C’est au minimum une suppression de 25 % des effectifs des 60 000 facteurs qui est envisagée.

Résister, c’est remettre en cause la recherche de profit, pour une Poste socialisée

Il y a bien sûr urgence pour les postiers à se mobiliser, avec la population. Cela commence par exiger que les bénéfices du groupe aillent aux salaires, au maintien des emplois et à l’amélioration des conditions de travail.

Mais c’est aussi expliquer que la seule issue réelle est de gérer cette société différemment. Partager le travail en croissance comme le colis entre tous, passer aux 32 h, faire un tarif unique de la lettre à 50 centimes, maintenir le lien quotidien des facteurs sur des tournées attitrées…tout cela ne peut se faire que si ce sont les salariés et les usagers qui sont aux commandes, et qui gèrent La Poste, comme l’ensemble de la société, non pas pour les profits mais pour satisfaire les besoins collectifs.