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Le théorème de Marguerite, film d’Anna Novion

Marguerite (Ella Rumpf) est en thèse de mathématiques à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm. Elle ne paraît pas avoir de centre d’intérêt en dehors des mathématiques…

Sa thèse, préparée sous la direction de Laurent Werner (Jean-Pierre Darroussin) est en rapport avec la conjecture de Goldbach – cet énoncé d’une simplicité déconcertante n’est toujours pas démontré dans le cas général : tout nombre entier pair supérieur à 3 est somme de deux nombres premiers (par exemple : 40 = 3 + 37 = 11 + 19 = 17 + 23, soit trois solutions au problème pour 40).
Lors d’un séminaire, Marguerite présente les résultats auxquels elle est parvenue, mais Lucas (Julien Frison), un autre brillant doctorant que Werner a fait venir pour travailler avec Marguerite et lui, fait une remarque qui infirme tous ses travaux… Cette dernière décide de tout arrêter, rompt toute relation avec Werner, quitte l’ENS et, grâce à l’amitié improbable qu’elle noue avec une jeune aimant danser et faire la fête, Noa (Sonia Bonny), part à la rencontre de la vraie vie : petits boulots dans lesquels son esprit rigoureux ne parvient pas à se satisfaire de consignes illogiques…

Mais les mathématiques sont une passion dévorante, et Marguerite se replonge dans ses travaux qui envahissent littéralement son espace de vie…

Un film à la fois drôle et grinçant sur le monde universitaire où seules les « avancées » sont supposées compter, mais où les égos, la dérision et les trahisons prennent souvent la première place.

À noter que le scénario du film a été supervisé par la mathématicienne Ariane Mézard, spécialiste de géométrie arithmétique, qui nous garantit que toutes les formules qu’on voit à l’écran ont du sens. Ella Rumpf a travaillé son texte (par moments incompréhensible dans le détail pour le profane !) pendant plusieurs mois avec Ariane Mézard pour paraître naturelle à l’écran. Enfin, nouveauté dans la collaboration entre « branches » aussi différentes que cinéma et mathématiques, Ariane Mézard affirme que travailler sur le film lui a fait réaliser des avancées dans l’étude de la conjoncture de Goldbach…

Jean-Jacques Franquier