Nouveau Parti anticapitaliste

Nos vies valent plus que leurs profits

Les travailleuses de Vertbaudet en grève pour la troisième semaine consécutive !

Ce sont essentiellement des femmes qui travaillent dans ce centre logistique de la métropole lilloise. Celui-ci approvisionne tous les magasins d’Europe de cette enseigne pour vêtements pour enfants et jouets. Mais la griffe réalise 80 % de ses ventes par correspondance et c’est de ce même centre que sont expédiés, et depuis peu ne sont plus expédiés, les colis à destination des particuliers. Car depuis trois semaines, près de 150 d’entre celles qui normalement assurent l’emballage, la réception des commandes, l’expédition des marchandises, le recensement des pièces manquantes mais aussi la broderie… occupent un abri de fortune dans le parking à quelques dizaines de mètres de la devanture du centre. Pour la première fois, de mémoire d’ouvrière, une grève dure s’est engagée après que le patron a augmenté de 0,01 % les salaires cette année, une provocation de plus, une provocation de trop.

L’équipe de direction est coutumière de ce type d’humiliations. Dans l’enseigne il est interdit de boire autre chose que de l’eau, le café et le sirop sont proscrits et le management passe vérifier le contenu des gobelets. Lorsque le directeur cherche à faire accepter les 0,01 % d’augmentation, il conditionne la prime de 650 euros d’intéressement (contre 2 000 euros les années précédentes) à l’acceptation des salariées. Les équipes sont intimées les unes après les autres de voter immédiatement leur propre gel des salaires, sans quoi les salariées perdraient leur prime. Goguenard, le directeur faisant allusion à la prime déclare « les ouvriers c’est comme la sodomie, faut mettre de la crème et ça passera mieux ». Cet enfoiré exprime l’inconscient patronal. Une gréviste raconte qu’on lui refuse une demi-journée de RTT lors de la rentrée scolaire de sa fille. « Les enfants d’abord » le slogan de l’enseigne ne s’applique manifestement pas à ceux des salariées. Ce sont « toutes ces choses mises bout à bout » comme le dit une gréviste, qui nourrissent aujourd’hui la détermination. Parmi ces choses, et pas des moindres, l’inflation qui ronge ici comme ailleurs des salaires qui ne se retrouvent plus si loin du Smic après 20 ans d’ancienneté.

La grève a débuté lundi 21 novembre. Les ouvrières, représentantes syndicales inclues, découvrent leur centre bloqué par des militants de l’Union locale CGT de Tourcoing. Attente, hésitation et nombre d’entre elles, voyant que contrairement aux années passées le débrayage ne sera pas le fait de quelques-unes, refusent de rentrer dans le site. Conçu comme une action menée contre la réforme des retraites le blocage devient une grève portant ses propres revendications : 20 % pour toutes et tous, intégration des intérimaires, paiement des jours de grève sont les revendications posées par les salariées. La plateforme de livraison restera fermée aux camions jusqu’à l’intervention des forces de l’ordre le 27 mars. Elle est de nouveau bloquée depuis ce matin.

Le patron n’a fait aucune offre pour l’instant. Une déléguée qui a bien conscience que la première médiation qui doit se tenir aujourd’hui à 14 heures ne satisfera personne, évoque la quatrième semaine de grève. Car si la direction s’obstine, les grévistes sont très opiniâtres. Ni l’absence de résultats jusqu’aujourd’hui, ni le froid, l’humidité et la fatigue qui accompagnent l’occupation en 3 × 8 de ce piquet de grève n’a fondamentalement entamé leur détermination. Une caisse de grève permettra d’amortir le choc de mars. Quelques grévistes sont venus aider à la remplir en participant aux manifestations contre la réforme des retraites.

Hier les travailleuses sont venues rappeler au personnel intoxiqué par les mensonges de la direction qu’elles sont bien toujours en grève en allant tenir un piquet et des tracts devant le siège. Mais beaucoup reste à faire. En plus des deux magasins Vertbaudet de la métropole et de celui de Lens, le combat de ces travailleuses trouverait écho partout où l’on souffre des bas salaires. S’y rendre faire vivre activement la grève pourrait renouveler les perspectives de victoire et augmenter l’inquiétude, qu’on devine grande, de la direction du site. Elle pourrait trouver une résonance particulière dans cette situation de réorganisation du secteur de l’habillement. Quelques grévistes ont des idées pour l’animation de la grève mais l’absence de vrai cadre de délibération empêche de les centraliser et de veiller à leur mise en application. Autant de potentiel de progression pour un mouvement fort de sa détermination et de la signification sociale de cette grève d’ouvrières.

Correspondant