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Painkiller, série de Noah Harpster et Micah Fitzerman-Blue

L’argent, plus addictif que l’opium. Ce pourrait être le sous-titre de cette mini-série de six épisodes disponible sur Netflix, consacrée à l’une des plus graves épidémies de ces dernières années, responsable de près de 500 000 morts aux États-Unis : la crise des opioïdes.

En cause, l’OxyContin, un analgésique commercialisé à partir de 1995 par le laboratoire Purdue Pharma détenu par la famille Sackler. L’oxycodone, la molécule active de ce médicament, est en réalité un dérivé hautement addictif de l’opium. Mais le laboratoire, en mentant allègrement sur les chiffres, a réussi à faire croire qu’elle était sans danger, au titre que sa diffusion dans l’organisme était lente. Après tout, l’héroïne, un autre dérivé de l’opium, a bien commencé sa « carrière » comme antitussif commercialisé par Bayer…

La spécificité de l’OxyContin, c’est la stratégie marketing très agressive mise en place par Purdue Pharma pour écouler sa came. Une publicité tous azimuts, avec notamment des peluches en forme de cachet qui trônent sur les comptoirs des pharmacies, des visiteuses médicales sélectionnées pour leur physique, directement intéressées à ce que les médecins prescrivent des doses toujours plus fortes… Car on n’achète pas sa dose d’OxyContin à la sauvette, dans une cage d’escalier sordide. Les dealers de cette drogue sont des cadres d’entreprise, des responsables scientifiques, des médecins, des pharmaciens. Ils ont tous les voyants de la légitimité au vert. C’est l’atout de la série de montrer qu’au-delà d’un grand patron avide, c’est la structure même du système de santé qui a failli, viscéralement pourri par la course au fric.

L’autre force de la série, c’est de ne pas prendre de pincettes dans la critique des autorités publiques. Car ce ne sont pas seulement les fonctionnaires défroqués qui finissent par émarger chez Purdue qui sont ciblés, mais aussi les sommets de l’appareil d’État soucieux de préserver l’innocence de la richissime famille Sackler.

On suit également la trajectoire d’un garagiste qui après un accident du travail devient addict à l’OxyContin qui lui a été prescrit contre une douleur récurrente au dos. C’est un Blanc du nord-est américain, la victime typique de cette drogue qui ravage moins les ghettos noirs1 que les régions appauvries par la fermeture des grandes usines et où les douleurs chroniques provoquées par la violence de l’exploitation quotidienne minent les corps. Cette série à plusieurs niveaux est à voir absolument.

Bastien Thomas

 

 


 

 

1 Dans le sillage de l’OxyContin, d’autres opiacés ont commencé leurs ravages, comme le fentanyl, migrant de la campagne et des suburbs vers le centre des villes, touchant de plus en plus les Noirs et les Latino-Américains.