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Rage et désespoir dans la Russie de Poutine

Vladimir Poutine est en campagne présidentielle pour son maintien au pouvoir jusqu’en 2030. Un scrutin prévu le 17 mars sans surprise, Poutine ayant choisi trois « rivaux » qui ne font pas d’ombre à sa politique guerrière – et retoqué en dernière heure un Boris Nadejdine qui avançait timidement la « fin » de l’invasion en Ukraine. Le régime de Poutine, qui ose brandir la lutte contre le nazisme pour justifier l’agression militaire de l’Ukraine, use de l’assassinat politique pour faire taire ses opposants. Des figures marquantes et très diverses ont disparu de mort peu naturelle sous son règne, entre autres Anna Politovskaïa en 2006, Boris Nemtsov en 2015, Evgueni Prigojine en 2023, Alexeï Navalny tout récemment. Le mois dernier, l’opposant de gauche Boris Kagarlitsky a été condamné à cinq ans et demi de colonie pénitentiaire ; l’ancien président de l’association Mémorial, Oleg Orlov, à deux ans et demi de prison. Des jeunes anarchistes ou révolutionnaires sont sous les verrous. Poutine vient de faire bloquer le site d’opposants de gauche regroupés pour un appel à « Voter contre tous ! » le 17 mars prochain, « Pour une paix juste »… insupportable pour l’autocrate !

Dans un de ces discours fleuve dont il est coutumier, après quelques phrases où il rappelle que l’Ukraine appartient au « monde russe » et que l’« opération militaire spéciale » contre elle (la guerre) est légitime, Poutine déroule un catalogue de promesses électorales – construction de routes, augmentation du parc des tramways, etc., réduction de la pauvreté… Cette dernière a déjà été faite, jamais tenue. La Russie est en économie de guerre, d’où des conditions de vie et de travail aggravées et bouleversées pour la classe ouvrière1. Mais la télé russe aux ordres sait éliminer les images de soldats morts et de villes ukrainiennes dévastées, au profit d’images de petites filles aux yeux bleus et jolis nœuds dans les cheveux, d’enfants russes heureux, quoi ! D’ailleurs, a dit Poutine, il faut faire des gosses et pas qu’un ! « Une famille nombreuse doit devenir la norme », selon lui. Mais malgré ses incitations financières natalistes, la démographie est en berne2.

Depuis février 2022, le pays a encore perdu un million de personnes : il y a les morts sur les fronts, les exilés à l’étranger, ceux qu’on appelle les « cerveaux » comme cette partie de la jeunesse qui ne veut pas être mobilisée, par conviction anti-guerre, par peur, ou les deux.

C’est dans ce contexte que les obsèques d’Alexeï Navalny, conservateur nationaliste russe qui avait choisi ces dernières années l’axe politique plus neutre et consensuel de l’« anti-corruption », mais dont Poutine s’est fait l’ennemi intime et qu’il a fait assassiner dans ses geôles, ont été l’occasion pour des milliers de personnes, partisanes ou pas de Navalny, de manifester leur peine mais aussi leur rage contre le régime, étroitement surveillées par les forces policières. C’est à la fois peu mais beaucoup…

Michelle Verdier, 5 mars 2024

 

 


 

 
Cet article est paru dans Révolutionnaires numéro 11, mars 2024, avec d’autres articles sur l’Ukraine.

Articles sur la guerre en Ukraine paru dans Révolutionnaires numéro 11

 

 


 

Lire aussi le dossier complet paru en février 2024 sur notre site.

 

 


 

 

1  Voir sur notre site, https://npa-revolutionnaires.org/tout-pour-le-front-comment-la-guerre-modifie-le-marche-du-travail-en-russie/, la présentation d’un article intéressant de Azamat Ismaïlov.

2  Statistiques publiées le 4 mars dernier par une université canadienne :
https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMTendanceStatPays?codePays=RUS&codeStat=SP.POP.TOTL&codeTheme=1 148,5 millions en 1992 ; 142,7 millions en 2008 ; 144,5 millions en 2018 (+ 2 millions de la Crimée annexée en 2014) ; 144,2 millions en mai 2022. Depuis, avec le nouvel épisode guerrier de février 2022, départ d’un million encore…