Nouveau Parti anticapitaliste

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Rencontres nationales travail social en lutte

Amplifier le mouvement contre la réforme des retraites en s’appuyant sur les revendications et les mobilisations des salariés du social et médico-social

Le week-end des 25 et 26 mars 2023, des travailleuses et travailleurs, des étudiantes et étudiants, du secteur social et médico-social se sont réunis à Lille, pour les dixièmes rencontres nationales du travail social en lutte. Voilà cinq ans que ce cadre, issu de la coordination de collectifs regroupant syndiqués et non-syndiqués ainsi que des syndicats locaux combatifs, se tient deux fois par an, dans l’objectif de coordonner les équipes militantes et unifier les luttes du secteur face aux attaques, du gouvernement, du patronat et des financeurs.

Discussions à la chaleur des mobilisations

Impactées par l’exceptionnel mouvement social contre la réforme des retraites et malgré les galères d’acheminement liées à de la grève dans les transports, ces rencontres ont tout de même pu réunir une cinquantaine de personnes, syndiquées ou non, ainsi que des représentants et représentantes de collectifs, de fédérations et structures syndicales. L’idée étant que des équipes à la base impulsent, tout en cherchant à entraîner les syndicats et le maximum d’équipes militantes.

Ordre du jour adapté à la situation, les débats ont été entrecoupés de départs en cortège travail social dans les  manifestations contre la loi Darmanin et contre la réforme des retraites qui ont lieu tous les soirs à Lille depuis le 49.3. Joindre la théorie à la pratique, cela fait aussi partie de l’ADN de ce réseau militant.

Pendant les débats, l’heure a d’abord été au bilan des dernières mobilisations sectorielles de novembre 2022 et février 2023 (voir cet article), axées sur les augmentations de salaire, la défense des conditions de travail et de vie des salariés du secteur mais aussi celles d’accueil et d’accompagnement des publics.

Des chiffres de grévistes plus modestes qu’en décembre 2021, mais une détermination toujours très présente, indiquent que la séquence ouverte par les mobilisations phares de décembre 2021 n’est pas refermée. Les témoignages sur la situation catastrophique des services ont unanimement fait état de la nécessité de confrontation avec les décideurs, employeurs et gouvernement. L’inégalité de la prime Ségur et l’exclusion de milliers de collègues, comme le projet de casse des conventions collectives, restent également des sujets importants qui cristallisent la colère des travailleuses et travailleurs. Enfin, des étudiantes et étudiants de plusieurs centres de formation ont pu exposer leurs difficultés et leurs modes d’actions, et ainsi se mettre en lien pour la suite. La question du droit de grève et de la levée d’assiduité afin de pouvoir participer aux manifs a été au centre de leurs discussions.

Le secteur du social et médico-social est particulièrement impacté par les politiques de contrôle social, de marchandisation et de mise en place de la tarification à l’acte, d’austérité et de baisse drastique des budgets et moyens de fonctionnement, imposées par ce système capitaliste voué à tout rentabiliser y compris le système de solidarité et dont le gouvernement incarne la fonction de valet serviable.
Le projet de loi Darmanin est un exemple flagrant de la combinaison du capitalisme et du racisme d’État dans la politique des macronistes. Parmi les éléments les plus crasses de la loi prévue par le gouvernement, on retrouve l’accentuation de la pressurisation des personnes immigrées de la classe ouvrière par le conditionnement du droit au séjour à un emploi précaire et dangereux, la suppression de l’aide médicale d’État (AME), la réduction du droit d’asile, etc.

En plus de travailler ou d’étudier dans des conditions très dégradées, ce sont aussi les salaires gelés face à l’inflation qui révoltent les collègues du social et médico-social.
Enfin, les salariés de ce secteur ont particulièrement conscience des dangers de la réforme des retraites. En tant que travailleuses et travailleurs d’un secteur majoritairement féminin, d’une part, où les temps partiels et les carrières hachées sont monnaie courante et où les conditions de travail sont régulièrement difficiles, où la charge de travail s’accroît au fur et à mesure des politiques libérales et austéritaires. D’autre part, car elles et ils sont aux premières loges pour constater la violence des politiques capitalistes sur notre classe, l’accroissement de la pauvreté, le délitement du lien social, comme la violence sociale qui s’abat contre celles et ceux qui sont poussés à la marge de la société. En première ligne aussi pour comprendre qu’une telle réforme anti-sociale ne va faire qu’aggraver les conditions de vie de centaines de milliers de personnes et, in fine, venir faire grossir les files d’attente des services sociaux déjà débordés et incapables d’absorber autant de misère sociale.

En grève contre la réforme des retraites et pour de meilleures conditions de travail et de vie

Les grèves sur des questions locales et particulièrement pour les exclus du Ségur se multiplient, même si pour l’instant, elles restent éparses et souvent cantonnées à un établissement, un conseil départemental ou une association, et qu’elles ont lieu dans des temporalités décalées. Il existe aussi des mobilisations contre des fermetures de service et des fusions-absorptions.

L’ensemble des collègues sont très investis dans le mouvement contre la réforme des retraites et construisent les AG interpro comme les actions de solidarité avec les grévistes de secteurs en pointe par des actions de blocage, également par des actions de visibilisation de la grève en participant à des barrages filtrants et tractage. Plusieurs salariés ont d’ailleurs fait état de leur entrée en grève reconductible, même minoritaire, depuis le 7 mars, convaincus qu’il est nécessaire de généraliser la grève reconductible afin de ne plus céder à la grève par procuration, mais surtout pour dégager du temps afin de convaincre le plus largement possible. La grève reconductible permet également de faire un pas de côté face à la pression de notre situation professionnelle, faire un pas de côté sur la culpabilité de quitter nos postes.

La discussion a donc tourné autour des méthodes de mobilisation du plus grand nombre de collègues, sur l’importance de tenter partout où cela est possible de faire des AG de grévistes du secteur les jours des dates nationales, de tenter de visibiliser aussi les revendications sectorielles avec la mise en place de cortège, bref de regrouper les collègues, de permettre de sentir la force collective dans un secteur qui se caractérise par l’atomisation des unités de travail et la diversité des statuts et des champs professionnels.

Frapper toutes et tous ensemble !

Les débats ont permis d’avancer sur le fait de combiner rythmes et revendications, afin de continuer la mobilisation et même l’amplifier et de gagner enfin ! L’idée sous-jacente et partagée largement était qu’il existe un lien fort entre le fait que gagner contre la réforme des retraites allait permettre de gagner sur les revendications sectorielles, et le fait de mobiliser sur nos revendications sectorielles permet également de construire le mouvement général contre cette attaque majeure du gouvernement.

Samedi soir, c’était repas partagé autour d’un couscous fait par une association du quartier suivi d’un karaoké afin de mêler le sérieux des débats à la fraternité de la fête entre collègues, mitants et militantes.

Dimanche matin, avant que chacun retourne construire la mobilisation dans sa ville, un appel a été rédigé et voté. Cet appel a donc fait état des débats et décisions du week-end, et permis de tracer des perspectives pour le court et moyen terme.

Les objectifs affichés sont donc :

– d’amplifier la mobilisation en cours contre la réforme des retraites ;

– de construire une journée de grève du secteur social le 23 mai, jour des négociations patronales partout en France ;

– d’exprimer notre colère et nos revendications lors des assises nationales de la protection de l’enfance à Nantes le 29 et 30 juin.

Cet appel est soumis à la signature de tous les collectifs militants et structures syndicales du secteur qui souhaitent s’y associer. Il permet également d’organiser des réunions autour de son contenu, de convoquer localement des intersyndicales, en bref de réunir autour des perspectives proposées.

Une cinquantaine de structures ont déjà répondu à l’appel.

André K et Iraultza H

 


 

Ci-dessous l’appel des rencontres nationales travail social en luttes