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Une ouverture du Salon de l’agriculture mouvementée, la colère ne redescend pas !

Comme il était prévisible, le Salon s’est ouvert dans le chahut avec la ferme volonté des paysans présents (FNSEA, CNJA et Coordination rurale) de perturber la déambulation présidentielle dans les allées. Malgré les multiples réunions entre gouvernement et syndicats (FNSEA, CNJA, Coordination rurale, Confédération paysanne, Modef) tenues pendant les semaines du conflit qui ont conduit à traiter quantité de sujets (jachères, plan phyto, contrôles, GNR, loi Egalim, normes, accords de libre échange, etc.) et à débloquer 400 millions d’euros, l’insatisfaction de la profession reste là.

S’il y a eu abondance de promesses, rien n’est arrivé jusqu’aux fermes, notamment aucune amélioration de trésorerie, ce qui irrite fortement. Car la question du revenu dans ce fatras d’annonces gouvernementales a été escamotée. Il apparaît aux yeux du plus grand nombre qu’Emmanuel Macron, qui a pris la main sur ce dossier, est un baratineur présomptueux de haute volée qui va les enfumer. La méfiance est totale, les attentes considérables, les raisons de se battre toujours là !

C’est quoi l’avenir ?

L’État a prévu le recensement cette semaine de toutes les exploitations agricoles françaises en difficulté. Mais pour en faire quoi ? Si c’est pour mettre une rustine en urgence sur le problème, même si c’est bon à prendre momentanément pour nombre d’agriculteurs en difficulté, ça ne répondra pas durablement au problème du revenu paysan.

Au cœur de la problématique du revenu, il y a le coût de production à la ferme et le prix de vente des produits agricoles à l’industrie agroalimentaire, aux coopératives agricoles et à la grande distribution. Entre coût de production et prix de vente, quand le premier est élevé et le second bas, le revenu dégagé par l’activité peut se révéler insignifiant voire nul ou négatif.

Tout travail mérite un revenu

La Confédération paysanne ainsi que de nombreux petits producteurs demandent l’établissement de prix planchers, auxquels les groupes industriels seraient contraints de payer la production agricole, quitte à prendre sur leurs marges, qui de plus se rattrapent déjà largement avec les bas prix de revient des mêmes produits dans les grosses exploitations qui les fournissent. Mais ça ne suffirait pas à fournir un revenu décent aux petits agriculteurs. D’abord en raison de la question fondamentale : qui fixerait les prix en question. Si c’est la FNSEA ou le gouvernement, autant dire que ça ne changera pas grand-chose à la situation actuelle des petits paysans. Ce type de mesure avait d’ailleurs déjà été mis en œuvre pour le blé en 1936 sous le Front populaire avec l’Onib (Office national interprofessionnel du blé), et si le prix du blé payé aux agriculteurs avait augmenté de façon significative sur le coup, les effets à long terme n’ont plus été probants dès que la pression exercée par les luttes s’est éloignée dans le temps…

Mais même cette introduction d’un prix minimum, qui ne bouleverserait pourtant pas de fond en comble le marché agricole, suscite l’opposition des partisans du capitalisme débridé et du « libre » jeu du marché. Ce qui a fait dire au dirigeant d’un grand groupe laitier : « On a vu ce qui s’est fait en Russie et à Cuba, avec les résultats qu’on connait. »

En second lieu, les patrons de l’agroalimentaire, comme le président de Lactalis, dénoncent un système de prix planchers qui rendraient moins compétitifs à l’export, disent-ils, les produits français et leur feraient perdre des parts de marché à l’international. Sur cette question, les coopératives agricoles ont le même point de vue que les grands groupes privés, ce qui signe là leur éloignement des paysans et leur alignement capitaliste…

Loi d’orientation agricole, mystérieuse et attendue…

De temps en temps, quand nécessité il y a, une nouvelle loi d’orientation agricole voit le jour. Son objet est de dresser les nouvelles perspectives d’organisation du secteur agricole, des exploitations jusqu’à l’agroalimentaire. De ce cadre législatif découle toutes les décisions relatives au développement de l’activité.

Macron a indiqué qu’un travail de rédaction de loi d’orientation était en cours, sans pour autant livrer d’information à ce sujet, ni contenu, ni date. S’il existe un texte qui intéresse au premier chef les paysans c’est bien celui-ci. Faut croire qu’ils sont la dernière roue du carrosse ! Pourtant, dans les dix ans à venir, 30 % des agriculteurs partiront à la retraite. Il y a là un vrai défi à relever pour renouveler les générations, installer dans le métier des jeunes, et transmettre l’outil de production. Comme il sera nécessaire de prendre en compte les changements climatiques à venir, la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, la neutralité carbone, la juste répartition des terres et des outils de travail, le revenu minimum… Cette loi d’orientation valable pour la prochaine décennie est donc à la fois attendue et redoutée par celles et ceux qui ont besoin de comprendre à quelle sauce ils seront mangés.

En attendant, les agriculteurs se battent et se font entendre. La lutte, c’est bien la seule voie qui peut permettre aux petits paysans, poussés à la misère en amont et en aval par le grand capital, d’obtenir de quoi vivre de leur travail.

Marty Leterrien