Nouveau Parti anticapitaliste

Nos vies valent plus que leurs profits

Salon de l’agriculture : quand les profits imposent leur dictature !

Le Salon de l’agriculture, vaste parc zoologique où se bousculent des milliers de personnes attirées par la campagne en plein Paris et les dégustations de vin, a au moins le mérite de soulever les problèmes que rencontrent les paysans, du moins ce qu’il en reste. 389 000 fermes actuellement. 100 000 ont disparu en dix ans et ce sont 100 000 agriculteurs qui seront à la retraite d’ici 2030. C’est dire que le monde agricole se déplume à grande vitesse pour le plus grand bien des gros capitalistes de l’agriculture, car ce sont eux qui s’agrandissent en accaparant les terres disponibles, quand ce ne sont pas les trusts de l’agro-alimentaire ou de la distribution qui rachètent ces terres. Actuellement, une ferme sur dix est rachetée par ces trusts pour, prétendent-ils, maîtriser l’approvisionnement – en réalité pour être à terme en position de force dans le marché agricole où la spéculation va bon train et profite actuellement à toute une mafia occulte de revendeurs, tant sur le marché des céréales que celui de la viande ou du vin.

Dans ce marché capitaliste, tout se fait en fonction de la production de denrées susceptibles de rapporter gros à un moment donné, rien au regard des besoins de la population. L’envolée des prix est parfaitement coordonnée par de gros spéculateurs de l’agro-industrie, comme il en est pour le pétrole, l’électricité ou le gaz. En début de chaîne, ce sont les paysans, mais pas tous, qui trinquent et, à la fin, ce sont les consommateurs !

La production agricole française a fait un bond de 17,4 % en valeur en 2022, après une bonne année 2021. C’est la pression spéculative suite au Covid et à la guerre en Ukraine qui a fait monter les prix alors que les récoltes étaient stabilisées !

Naturellement, pour ce système, ce sont les producteurs de grandes cultures (céréales, oléagineux, etc.) qui profitent de cette situation alors que l’élevage, tributaire des céréaliers, poursuit son déclin.

Mais l’agriculture a toujours été sous perfusion des aides européennes (la politique agricole commune, la PAC) et étatiques, pour pallier la dictature des prix imposée par la concentration de l’agro-industrie et de la grande distribution qui font la pluie et le beau temps, même en période de sécheresse !

Une agriculture sous perfusion mais qui favorise la concentration des fermes au détriment des petites productions, souvent bien plus soucieuses d’une production alimentaire saine.

Avec le Salon de l’agriculture, le gouvernement n’a pas hésité à sortir le carnet de chèque pour aider des filières en difficulté, alors qu’elles n’ont cessé de garnir leur coffre-fort. 160 millions d’euros pour la viticulture, 150 millions pour la sylviculture, 60 millions pour les betteraviers, 1,2 milliard pour la filiale volaille, 350 millions pour la filiale porcine. Outre que ces aides vont principalement dans la poche de gros producteurs qui empoisonnent la terre, l’eau et les consommateurs à petit feu, pratiquement rien n’est fait pour aider la filière d’agriculture biologique qui connaît depuis deux ans des difficultés liées aux hausses des prix. Une nourriture un peu plus saine n’intéresse pas le gouvernement, ni le principal lobby paysan qu’est la FNSEA, qui ne défend que l’agriculture industrielle.

Le salon de l’agriculture a été aussi prétexte à disserter sur la souveraineté alimentaire, de la gauche à la droite en passant par Macron. Comme s’il pouvait y avoir dans ce monde capitaliste une orientation de la production pour la satisfaction des besoins d’ici et d’ailleurs. Oui, il est urgent que les travailleurs des champs et ceux des villes orientent leur labeur pour une production tenant compte des besoins, de l’entretien des sols et de la biodiversité, de ce qui peut y être produit ou pas sans assécher les nappes phréatiques et les cours d’eau… Mais l’agriculture est entre les mains des capitalistes, comme le reste de l’économie. Les cours mondiaux fluctuent en fonction des profits à réaliser quitte à mettre en faillite des millions de paysans, pire, installer la famine dans nombre de pays. Les capitalistes sont capables de détruire des millions d’hectares de forêt tropicale pour imposer une culture, puis passer à une autre destruction quand celle-ci n’est plus rentable. Et tant qu’on ne leur ôtera pas ce pouvoir, il ne pourra pas y avoir d’agriculture durable pour le bien de tous.

Élise Moutiers