Nouveau Parti anticapitaliste

Nos vies valent plus que leurs profits

Série Harry McCoy, d’Alan Parks

Alcool, drogues bon marché, prostitution, assassinats, caïds sans pitié d’un côté. Flics, juges et politiciens corrompus de l’autre. Une richesse insolente d’un côté, et de l’autre une classe ouvrière pauvre, vivant dans des taudis humides. La violence est partout. Glasgow, années 1970.

Une série de romans où les intrigues policières bien ficelées décrivent en arrière-plan la troisième ville du Royaume-Uni, une ville alors connue pour ses logements décrépis, suintant l’humidité et où l’espérance de vie dans les classes populaires est bien plus courte que dans le reste du royaume. L’alcool coule à flots et abrutit les consciences. Des hommes et des femmes boivent la paye du mois, laissant des enfants dans le dénuement et la malnutrition. L’East End est pauvre et catholique. Bien des enfants de familles pauvres leur sont retirés et placés dans des institutions catholiques. Avec leur lot de punitions brutales, de sévices sexuels. Et de haine ancrée au fond de l’esprit d’adultes traumatisés. Ça bastonne à Glasgow. Ce n’est pas pour rien que les affrontements ne sont pas seulement sportifs entre les supporters de l’équipe des Glasgow Rangers, protestants et se sentant britanniques, et ceux du Celtic, catholiques, pro-Irlandais. La lutte de classe y prend tous les chemins possibles. Le premier volume de la série commence d’ailleurs par cette citation de Platon placée en exergue : « Toute cité, si petite soit-elle, est en réalité divisée en deux : celle des riches et celle des pauvres. Chacune en guerre avec l’autre. »

Au fil des livres de la série, l’abrutissement explose littéralement dans ce milieu des années 1970 avec l’émergence des filières des drogues de synthèse. Un climat glauque, donc. Mais c’est la ville elle-même qui l’était. Dès les années 1960, elle a connu la désindustrialisation et le chômage. Aujourd’hui encore, alors que Glasgow et sa banlieue abritent 41 % des habitants de l’Écosse, 24 % de la population active y est au chômage. Le Monde écrivait le 24 mars 2021 : « À Glasgow, l’espérance de vie des hommes est de 73,6 ans, contre 79,4 ans au Royaume-Uni. Dans le quartier défavorisé de Possilpark, elle descend même à 66 ans, le même niveau qu’en Érythrée. »

Le héros à travers lequel Alan Park nous conte Glasgow, le flic Harry McCoy, la trentaine, a eu son lot de déboires. Il ne refuse jamais une ligne de coke et écluse les bouteilles de mauvais whisky. Son meilleur copain est un chef de la pègre locale. Harry McCoy est donc un poil ripou, mais c’est un des rares flics que l’injustice met en colère…

Chaque livre de la série porte le nom d’un mois de l’année. En français, seuls les quatre premiers ont été traduits pour l’instant : Janvier noir, L’Enfant de février, Bobby Mars for Ever et Les Morts d’avril. Les trois premiers sont publiés en collection de poche (Rivages/Noir). Le quatrième est publié en grand format et paraîtra en poche début mai.

Jean-Jacques Franquier